MONTE-CRISTO

MISE EN SCÈNE : NICOLAS BONNEAU & FANNY CHÉRIAUX

Durée : 1H40

Texte : Nicolas Bonneau, Fanny Chériaux, Héloïse Desrivières
Assistanat à la mise en scène : Héloïse Desrivières
Collaboration artistique : Eliakim Senegas-Lajus
Composition musicale : Fanny Chériaux & Mathias Castagné
Interprétation : Nicolas Bonneau, Fanny Chériaux & Mathias Castagné, Scénographie : Gaëlle Bouilly
Lumières : Stéphanie Petton
Son : Gildas Gaboriau, Costumes : Cécile Pelletier,
Film d’animation : Antoine Presles
Régie son et vidéo : Glidas Gaboriau ou Ronan Bouquet
Régie lumière : Stéphanie Petton ou Clément Henon
Régie plateau : Gaëlle Bouilly, Visuel : Julien Jaffré
Production et tournées : Noémie Sage

Edmond Dantès, jeune marin de dix-neuf ans, débarque à Marseille pour s’y fiancer le lendemain avec la belle Catalane Mercédès.
Trahi par des « amis » jaloux, il est dénoncé comme conspirateur bonapartiste et enfermé dans une geôle du château d’If, au large de Marseille. Après quatorze années d’emprisonnement, il réussit à s’évader et entreprend alors de se venger méthodiquement de ceux qui l’ont accusé à tort… L’art des séries si prisé dans nos foyers ne date pas d’hier. En 1844, Dumas entamait la publication du roman feuilleton Le Comte de Monte-Cristo demeuré mythique. Avec leur exceptionnel talent, le conteur Nicolas Bonneau, la musicienne comédienne Fanny Chériaux et le guitariste Mathias Castagné revisitent ce monument sur le mode d’un palpitant polar radiophonique à regarder, feuilleton aux allures «tarantinesques», aux accents «morriconiens», mêlant satire social et élans romanesques, dans lequel le spectateur succombe avec le héros aux jouissances sans limite de la vengeance.

 

MISE EN SCÈNE :

 

Un souffle.
Une voix murmurante, sortie du fond des abysses.
Un mouvement, balancement lent et continu de guindes serpentant au-dessus du plateau jonché d’or.
La voix se fait de plus en plus présente, un chant s’élève, un piano et une guitare surgissent, au accents « morriconiens », mêlant grands espaces et chevauchées fantastiques.
Ainsi commence l’épopée d’Edmond Dantès, futur comte de Monte-Cristo.

Puis on se retrouve dans une taverne, voix de cabaret à la Tom Waits, un conteur nous narre avec jubilation l’affreux complot dont le héros est victime, à grands renforts de personnages pittoresques.
Durant cette traversée, la voix de Mercédès s’élève et chante ce récit d’impossible retour, les guindes se referment sur nous tels les barreaux d’une prison, un film d’animation nous conte les mille et une nuits, les salons parisiens s’animent dans tout leur orgueil et leur ridicule, la quête d’un trésor se transforme en enfantin jeu de piste, le narrateur se fait juge, avocat, héros vengeur, et la machine infernale s’emballe, laissant le spectateur à bout de souffle, devant pourtant à contrecoeur refermer le livre de cette histoire terrible et universelle.

 

LA MUSIQUE :

 

Envolées lyriques, chevauchées, grands espaces, western, bruitages, mots slamés, scandés, susurrés, chantés, refrains entêtants, leitmotivs,corps rythmiques, fil dramaturgique à elle toute seule, la musique du spectacle
Monte-Cristo est un personnage à part entière. Elle encercle le conteur, le porte, le cajole, le console, le malmène, le bouscule, l’interrompt, lui chante la destinée de son héros, la fatalité en marche.Cette musique n’a que faire de ses influences,seul compte ce pour quoi elle est là : raconter.

Composition: Fanny Chériaux et Mathias Castagné.
Instruments: Voix, Piano, Accordéon, Cello, Guitares, Percussions, Loops.

 

LA FORCE DE L’ÉPOPÉE ROMANESQUE :

 

Bien souvent, dans les romans feuilletons du XIXème siècle, l’auteur étant rémunéré à la ligne, il lui fallait encombrer son récit de dialogues et péripéties inutiles. Il serait aisé, par exemple, de réduire de moitié les textes
bavards d’Alexandre Dumas, sans pourtant rien changer de leur sens. Cependant, faisant de nécessité vertu, Dumas a su retourner cette contrainte en avantage, et transformer ces phases de remplissages en des séquences d’attente, en étapes obligées de patients crescendos qui ne font que décupler l’impact de leurs coups de théâtre. Dans son livre De Superman au surhomme, un essai consacré à la grandeur de la littérature populaire et feuilletonnesque, Umberto Eco évoque Gramsci citant lui même Dumas : « J’affirme que la prétendue surhumanité de Nietzsche a pour origine et modèle doctrinal non pas Zarathoustra, mais le comte de Monte-Cristo.» Umberto Eco dit du Comte de Monte-Cristo que certes, Dumas, parfois, « écrit comme un cochon, mais avec une telle force qu’on s’en repaît, qu’on s’y complaît. » De la négligence de style comme forme de jouissance ? Umberto Eco, sémanticien du paradoxe, voit dans Le Comte de Monte-Cristo « le plus grand roman mal écrit » et s’en déclare ravi. C’est cette idée même de l’imperfection qui laisse la place au lecteur pour se projeter dans l’écriture. Une écriture face à face et sans aucun surplomb de l’auteur sur le lecteur. Une écriture efficace qui fait le choix de laisser la place la force de l’histoire plutôt qu’au style et qui en cela constitue un vrai choix littéraire. Et c’est cette même idée du « mal écrit » ou disons plutôt « moins stylisée », qui ouvre et offre également plus de place au passage à l’oral et à la parole du conteur sur scène, qui permet de se
concentrer sur le récit et pas sur la littérature. S’approprier un récit qui parle et raconte, qui a été écrit comme tel dans son essence littéraire. S’emparer et poser comme choix de cette adaptation, de ne pas garder les mots de Dumas, mais d’en garder le ton, l’intrigue, le rythme et la structure globale. Conserver l’émotion et la sensation du lecteur dans son rapport au temps et à l’halètement. Comment faire passer tout cet engagement du récit
dans une seule (ou parfois plusieurs) voix sur scène et créer ainsi un nouvel espace pour cette littérature. Tout l’enjeu de ce spectacle sera donc de jongler entre la structure narrative du récit, la force des personnages et des situations, de condenser ce long fleuve littéraire, pour que le conteur se réapproprie la langue, la réinvente, l’oralise et la fasse sienne !

 

POURQUOI RACONTER LE COMTE DE MONTE-CRISTO AUJOURD’HUI ? :

 

Lorsque j’ai eu le projet d’adapter un grand roman populaire, une grande histoire feuilletonesque, l’autrice Héloïse  Desrivières à qui je soumettais cette idée m’a lancé: « alors c’est le Comte de Monte-Cristo qu’il te faut, il y a tout, la vengeance, l’aventure, le suspens, le social ». Je l’ai relu durant l’été et en effet, l’évidence m’a sauté aux yeux. J’y ai retrouvé ce souvenir d’adolescence, celui de se plonger dans un roman, pendant des heures sous la couette ou dans un jardin en été. Le plaisir de lire ces 1600 pages, d’en ralentir la fin de la lecture pour que ça ne se s’arrête jamais, cette sensation d’être absorbé dans une épopée que je retrouve aujourd’hui dans le plaisir des séries télévisées. Au-delà du souvenir d’enfance, du plaisir de se faire raconter une histoire par le conteur Dumas, d’y plonger avec appétit (ce qui n’est déjà pas rien), il y a dans Le Comte de Monte-Cristo une pertinence philosophique et un esprit de revanche sur la naissance du capitalisme qui résonnent avec notre monde actuel. Nicolas Bonneau, conteur Pourquoi Monte-Cristo ? Dans Monte-Cristo, la grandeur de la révolte
vient du malheur. La vengeance devient le moteur. Monte-Cristo est faux et menteur et sa vérité viscérale n’appartient qu’à lui. De là un malaise, un tiraillement : nous sommes avec Edmond Dantès contre tous ceux qui lui ont volé sa vie, mais jusqu’où cautionnons-nous la vengeance ? Où se situe la frontière du bien et du mal ? Dantès est-il un personnage si aimable que cela ? Lui, que nous commençons par aimer, finit par nous faire douter de notre propre empathie. Il y a aussi, dans ce roman publié en 1884, une description précise de certains aspects de la vie politique, économique et mondaine. Le Comte de Monte-Cristo apparaît d’abord comme un roman réaliste dans lequel l’action semble déterminée par les mouvements de l’Histoire. C’est parce que la première Restauration est une période politiquement confuse, propice à l’arbitraire et au déni de justice, que Dantès peut être emprisonné. C’est parce que son retour coïncide avec le moment où le capitalisme se développe et où la fortune remplace le titre ou le mérite qu’il peut occuper le devant de la scène sans que l’on s’interroge sur son
passé. Ce roman dans lequel il est beaucoup question de dots, d’héritages et de spéculations boursières, prend alors des allures de critique sociale. Celle de l’argent-roi et de l’immoralité qui lui est inhérente. Celle d’une société dont les notables – ici, un banquier, un général et un magistrat – peuvent s’avérer de grands criminels.  Il y a enfin la structure narrative, la dramaturgie exemplaire de Dumas : le suspens, la quête, les personnages, les descriptions, l’aventure. Comment va-t-il se venger et y parviendra t-il ? Pourra-t-on enfin pleurer, s’émouvoir et trembler tout en se sentant vaguement coupable ? Tous les ingrédients d’une bonne histoire… Reste à savoir comment raconter ce monument de la littérature populaire, comment s’approprier ce fleuve de 1600 pages afin d’en faire un objet de théâtre accessible et exigeant. Digérer la langue et les personnages, libérer le fond du propos, intéresser adolescents et adultes, en cherchant la forme originale dans laquelle tout cela pourra s’épanouir, entre les mots, la musique et un univers visuel. Nicolas Bonneau et Fanny Chériaux, metteurs en scène

 

LA COMPAGNIE LA VOLIGE :

 

Sous l’impulsion du conteur Nicolas Bonneau et de la musicienne et comédienne Fanny Chériaux, le projet de la Volige se développe sur trois axes.
Depuis 2009, Nicolas Bonneau explore l’art du conteur et du récit, ancré dans le collectage et le théâtre documentaire, avec des formes légères capables de s’adapter à tout type de lieux, et d’autres formes plus spectaculaires destinées aux plateaux des théâtres. Une écriture au plateau, sur des sujets sociaux et politiques. Un théâtre exigeant qui s’adresse au plus grand nombre. (Sortie d’Usine, Inventaire 68, Fait(s) Divers, Qui va garder les enfants, Une vie politique, Mes ancêtres les Gaulois). Depuis 2013 et l’arrivée de Fanny Chériaux, un nouvel axe de récit musical s’est ouvert, où la musique est partie prenante du récit (Ali 74, Looking For
Alceste, Les malédictions, Mes Nuits avec Patti, À nos classiques, Monte-Cristo). Et enfin, un développement des projets de territoires et de création in situ, où la pratique du collectage est déterminante. Ce projet a pris son incarnation en Haut Val de Sèvre, lieu d’implantation de la compagnie, mais aussi auprès de nombreux théâtres. Citons La tournée des cafés oubliés (4 éditions), Fondus de Fonderie, Village Toxique, les Portraits ordinaires ou encore la direction depuis trois ans de Traverse !, festival des arts de la parole en Haut Val de Sèvre. Ces projets font le plus souvent partie du processus de création des spectacles.
Depuis 2019, Nicolas Bonneau, Fanny Chériaux et Noémie Sage ont fait le choix d’une gouvernance collective et partagée. Nicolas et Fanny écrivent et mettent en scène, pendant que Noémie gère l’équipe administrative, la production, l’administration et les tournées de la Volige et du festival Traverse ! La Volige est également régulièrement associée à des structures culturelles : Théâtre des Sources (Fontenay aux Roses), Théâtre Jean Lurçat (S.N. d’Aubusson), Théâtre de Cornouaille (S.N. Quimper) .